Les cendres de Marcel Bigeard reposent désormais à Fréjus

Les cendres du général Bigeard ont été transférées au Mémorial des Guerres en Indochine à Fréjus mardi 20 novembre, en présence notamment de l’ancien président de la République Valéry Giscard d’Estaing , du ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, ainsi que du ministre délégué, chargé des Ancien combattants, Kader Arif.

Le 18 juin 2010, jour anniversaire de l’Appel du général de Gaulle, le général de corps d’armée Marcel Bigeard disparaissait à l’âge de 94 ans.
 En répondant au souhait de sa famille, et en respectant au plus près les dernières volontés du défunt, le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a inauguré à la demande de sa fille Marie-France Bigeard, le 20 novembre à Fréjus sur le site du Mémorial des Guerres en Indochine, la stèle accuei犀利士
llant les cendres du soldat.

« Celui qui était aimé et admiré de tous avait en échange la passion de ses soldats. C’est pour cette passion que nous sommes réunis ici. En l’accompagnant au mémorial de Fréjus, nous ne rendons pas seulement hommage à son engagement en Indochine, nous saluons tous ceux qui comme lui furent engagés et y perdirent la vie pour la France», a déclaré le ministre lors de son message.

«Un général de corps d’armée sorti du rang, c’est un très bel exemple d’élévation. Un très bel exemple pour nos armées et pour la République », a-t-il jouté.

Valéry Giscard d’Estaing, ancien président de la République était lui aussi présent lors de cet hommage. « Je suis ici pour deux motifs : la reconnaissance en tant qu’ancien chef des armées et la fidélité pour cet homme qui a rendu de grands services à la Nation de part ses missions. ».

Blessé cinq fois, titulaire de 24 citations individuelles, bien plus qu’un chef, le général Bigeard était un meneur d’hommes.

Du stalag XII A, dont il s’évade après trois tentatives infructueuses, au maquis de l’Ariège ; des cuvettes de Ban Som et de Dien-Bien-Phu en Indochine aux djebels algériens ; de Madagascar au Sénégal, il n’avait de cesse de conduire ses hommes (appelés aussi les « lézards verts »).

 

Proche du musée des troupes de marine, le Mémorial des Guerres en Indochine abrite les corps de milliers de soldats morts pour la France. Il sera la dernière demeure du général Bigeard, qui, comme il le souhaitait, repose désormais entouré par ses compagnons d’armes, morts au combat en Indochine.

VOIR les images

Bigeard : « Un très bel exemple d’élévation au mérite », selon le ministre de la Défense 

Jean-Yves Le Drian a présidé la cérémonie de transfert des cendres du général à Fréjus, se gardant bien d’évoquer la guerre d’Algérie…

Nous publions ci-dessous le texte intégral du discours prononcé par Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense, aujourd’hui à Fréjus, lors du transfert des cendres du général Marcel Bigeard au Mémorial des guerres d’Indochine. Ce transfert avait suscité quelques polémiques au sein de la gauche radicale, dont nous nous sommes fait l’écho. Prudemment, le ministre de la Défense s’est bien gardé d’évoquer la participation de Bigeard à la guerre d’Algérie, tout comme son engagement politique à droite… Reste que Jean-Yves Le Drian a tenu sa promesse d’un hommage au risque de faire crisser quelques dents dans son propre camp.

« Comme s’il n’avait rien laissé au hasard, c’est le 18 juin 2010, le jour du soixante-dixième anniversaire de l’appel du général De Gaulle, que le général Bigeard nous a quittés. Le 18 juin est un jour qui symbolise les valeurs de courage, de dévouement, de grandeur, qu’il a faites siennes tout au long de sa vie. Un jour qui nous rappelle aussi ses premiers combats en 1940, quand, prisonnier des Allemands, refusant lui aussi la défaite, il tente par trois fois de s’évader ; parvenu en zone libre, il part s’engager en Afrique ; et c’est aux côtés des résistants d’Ariège, où il a été parachuté, qu’il finit une guerre héroïque.

Le 20 novembre éveille d’autres souvenirs, ceux qui nous rassemblent aujourd’hui. Moi qui l’ai connu sur les bancs de l’Assemblée nationale, je crois qu’au fond, s’il avait eu vraiment le choix, c’est sans doute ce jour-là qu’il aurait retenu. Le 20 novembre 1953, le chef de bataillon Bigeard survole les rizières du Tonkin. Depuis 1945, c’est son troisième séjour en Indochine. Avec le 6e BPC, un an auparavant, il a déjà connu la gloire en ayant fait preuve du plus grand courage : à l’automne 1952, parachuté sur Tu Lê avec son bataillon, il est menacé d’encerclement par une division du général Giap. Commence alors l’une des manœuvres d’exfiltration les plus audacieuses de notre histoire militaire. Lui et ses hommes sont donnés pour perdus, mais ils se frayent un chemin à travers la jungle et déjouent la poursuite des combattants du Vietminh. Après plusieurs jours harassants, ils parviennent jusques aux lignes françaises. Toute la France vibre alors au seul nom de Bigeard, qui s’étale à la une des journaux. Une première fois, il venait de faire la preuve qu’une retraite pouvait être héroïque.

Au matin du 20 novembre 1953, l’opération Castor vient d’être lancée et le chef de bataillon Bigeard s’apprête à sauter sur Dien Bien Phu. Le « 6 » sera parachuté deux fois sur la cuvette. Ce matin-là, avec le 2ème bataillon du 1er régiment de chasseurs parachutistes, ils doivent s’emparer de l’aéroport et de ces collines dont les noms vont entrer dans l’histoire : Gabrielle, Béatrice, Eliane… Au terme d’un magistral combat, la mission est remplie, le colonel de Castries prend le commandement du camp retranché, Bigeard et ses hommes sont relevés.

Au printemps 1954, le général Giap décide une attaque générale contre Dien Bien Phu et conduit lui-même l’assaut. Le 6e BPC est parachuté le 16 mars, alors que le sort de la bataille est scellé. Sa seule arrivée insuffle du courage. Nommé lieutenant-colonel au cours de ces combats, Bigearddevient l’un des héros de Dien Bien Phu, l’un de ceux qui n’aura jamais baissé la tête. Le communiqué de victoire du Vietminh lui-même, rendra hommage à « l’acharnement et l’héroïsme extrêmes » dont il aura fait preuve.

On ne peut citer tous les combats de Marcel Bigeard. Pendant vingt ans, de l’Alsace au Sénégal, des cuvettes de Ban Som et de Dien Bien Phu aux djebels algériens, il est de toutes les guerres de la France, ayant lié son destin à celui de la Nation, parce qu’il a toujours cru en un idéal qui dépassait l’horizon de sa vie.

De l’Indochine, il rentre avec plus de vingt citations. C’est l’Indochine qui le révèle à la Nation comme un très grand soldat. C’est là, surtout, qu’il se distingue comme un chef charismatique, aux qualités exceptionnelles. Car celui qui était aimé, admiré de tous, avait en retour la passion de ses hommes, prompt à les exhorter au combat, mais toujours attentif à leur sort.

En un sens, c’est cette passion-là qui nous rassemble ici. En l’accompagnant dans sa dernière demeure, au Mémorial de Fréjus, nous ne rendons pas seulement hommage à l’engagement qui fut le sien en Indochine. Nous saluons la mémoire de tous ceux qui, comme lui, parfois à ses côtés, furent engagés en Indochine et y perdirent la vie, au service de la France. Aujourd’hui, nous sommes les témoins de ce lien qui s’est forgé au feu entre Bigeard et tous ces hommes, ce lien que rien n’aura pu altérer.

C’est que le général Bigeard fut d’abord l’un d’entre eux. Employé de banque entré dans l’armée comme militaire du rang, il s’est hissé, par son courage au feu et son aptitude au commandement, jusqu’au sommet de la hiérarchie militaire. C’est un très bel exemple d’élévation au mérite pour nos armées et notre République.

Général de corps d’armée sorti du rang, cinq fois blessé, titulaire de 25 citations individuelles et Grand-Croix de la Légion d’Honneur, il fut un parachutiste hors pair et un soldat infatigable, jusque dans les combats politiques qu’il a portés à l’Assemblée nationale et notamment à la Commission de la Défense qu’il présidait. C’est là que je l’ai connu. Avec lui, une page importante de notre histoire se tourne.

Aujourd’hui, cinquante-neuf ans après le début de l’Opération Castor, celui qui a donné aux « paras » de France quelques « parcelles de gloire » et une part essentielle de leur identité, rejoint dans l’éternité ses compagnons d’Indochine. Hommage lui soit rendu.

C’est dans le souvenir commun des combattants d’Indochine que nous nous recueillons aujourd’hui. S’il faut mesurer tout le chemin que nous avons parcouru depuis, n’oublions pas que ce conflit colonial fut un jour notre guerre et que ces hommes sont tous morts pour la France. Aujourd’hui, avec respect, nous leur rendons hommage. »


« Dernier soldat »? L’ancien président de la République Giscard d’Estaing était également présent. Il a rappelé avoir, un jour, étreint le général Bigeard et avoir pensé qu’il donnait « l’accolade au dernier soldat de notre histoire militaire ».

Bel hommage giscardien mais je ne suis pas sûr que les militaires français d’aujourd’hui apprécient tous. Après Bigeard, rien? Je crois au contraire que ce général a inspiré bien des militaires, quel que soient leurs grades, et que de nombreux militaires français méritent et mériteront aussi une place dans l’histoire de notre pays.

 

Les cendres du général Bigeard à Fréjus

Le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian inaugurera le 20 novembre à Fréjus, sur le site du Mémorial des Guerres en Indochine, la stèle qui accueillera les cendres du général de corps d’armée Marcel Bigeard.
Proche du musée des troupes de marine, cette nécropole nationale abrite les corps des milliers de soldats morts pour la France en Indochine, sera la dernière demeure du général Bigeard, qui, comme il le souhaitait, reposera entouré par ses compagnons d’armes, morts au combat en Indochine. Le 18 juin 2010, jour anniversaire de l’Appel du général de Gaulle, le général de corps d’armée Marcel Bigeard quittait, debout, à 94 ans, le ring sur lequel il disait, avec un犀利士
sourire un peu narquois, livrer son dernier round. Bien plus qu’un chef, le général Bigeard, était un meneur d’hommes. Celui vers qui les regards se tournent naturellement dans les moments les plus difficiles ; celui qui cultive le goût de l’exigence et de la “belle gueule”, celui qui enseigne que pour « être et durer » il faut être souple comme le cuir et trempé comme l’acier.
Blessé cinq fois, titulaire de 24 citations individuelles, le général Bigeard était le type même du combattant perpétuel. Du stalag 12A, dont il s’évade après trois tentatives infructueuses, au maquis de l’Ariège ; des cuvettes de Ban Som et de Dien-Bien-Phu en Indochine aux djebels algériens ; de Madagascar au Sénégal, il n’avait de cesse de conduire ses “lézards verts” pour quelques parcelles de gloire.